Maxime Legrand L'arbre qui cache la forêt.

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Title
Maxime Legrand L'arbre qui cache la forêt.
Description
Cette affiche de dimension 40x60cm est un photomontage réalisé avec le logiciel de la suite Adobe : Photoshop. Chacune des images utilisées dans la composition a été récupérée sur le net. La composition intègre divers filtres et effets et mêle des représentations graphiques, linguistiques et iconiques dans un environnement désertique.
A comme étudiant
Maxime Legrand
A comme question
1 - Justification du caractère trompeur de l'image
2 - Analyse syntaxique
3 - Analyse sémantique
4 - Analyse pragmatique
5 - Pourquoi et en quoi cette image est-elle trompeuse ?
6 - Raisons de ce choix
7 - Conclusion
8 - Bilan
A comme réponse
1 - L’idée que l’on se fait d’une image ne peut être indépendante de son contexte, au risque d’en avoir une interprétation erronée. Ce contexte peut, dans certains cas, détourner le sens des signes de leurs évocations logiques ou naturelles. Dans ces conditions, nous pouvons parler d’une image trompeuse. 

La création de cette affiche a été pensée à partir de ce concept d'image trompeuse.
À travers l'analyse de l'image, nous allons en découvrir les spécificités et questionner le sens derrière les éléments de la composition. Nous verrons que ces sens sont voués à évoluer en fonction des signes linguistiques et du contexte politique particulier que nous mettrons en avant : la COP 28. 
2 - 1- Analyse syntaxique

a. Composition graphique.

Cette scène prend place dans le désert, la lumière et les ombres semblent montrer que le soleil est en train de se coucher. Ces ombres créent un contraste fort et mettent en exergue les motifs des dunes sculptés par le vent. La couleur ambiante du désert semble être reflétée dans les nuances orange du ciel. Cet environnement chaud baigne tous les éléments de la composition et donne une cohésion visuelle à l’ensemble.

Dans cette scène presque crépusculaire, nous pouvons distinguer au premier plan un homme de dos portant le vêtement traditionnel qatari, le “dishdasha”. Il orne également un couvre-chef traditionnel assorti à sa tenue, la “ghutra”. Cet accoutrement paraît convenir à l’environnement désertique où il se trouve. L’orientation de son corps décrit un personnage statique, la face dirigé vers le seul arbre de la scène. Bien que nous ne voyons pas
son visage, son langage visuel semble trahir une certaine admiration pour ce dernier.

L’arbre déjà présenté couvre une partie importante et centrale de l’affiche. Il prend racine dans le sable du désert tandis que son feuillage couvre partiellement l'horizon. Cette mise en scène d’un arbre vigoureusement feuillu est la preuve de sa bonne santé. Cette vivacité paraît quelque-peu en décalage avec les conditions difficiles du désert.

En arrière-plan, la ligne d'horizon, partiellement masquée par les feuilles, est marquée par la silhouette de nombreux buildings. L’un d’eux surpasse par sa taille tous les autres, il possède également une forme particulière en pointe qui le rend facilement distinctif, il s’agit du Burj Khalifa à Dubaï. Ce dernier est disposé dans la partie gauche de l’image, dans l’axe présumé du regard de l'homme en train de fixer l'arbre. Un effet de texture poussiéreux s’ajoute à l’ensemble des éléments pour les salir et affirmer une fausse authenticité à cette affiche.

b. Iconique.

Un logotype est centré verticalement dans la partie haute de l'affiche, il est aisément distinctif puisqu’il est disposé derrière un ciel uniforme. Ce dernier est composé d'une partie graphique et d'une partie textuelle. Sa partie graphique représente un écosystème biologique composé de végétaux et d’animaux qui cohabitent avec les nouvelles technologies. Celle-ci s'accompagne d’un message textuel : “COP 28 UAE”. L’ensemble du logo représente l'événement de la COP 28 qui à eu lieu au United Arab Emirate. La couleur vert foncé est celle utilisée pour le logotype secondaire qui couvre le même événement. Ce vert contraste parfaitement avec les tons orangés en arrière-plan puisque ces deux couleurs sont complémentaires.

c. Linguistique

Au-dessus du logotype, à l'extrémité haute de l’affiche, une phrase qui prend toute la largeur fait office de titre pour la composition. Cette phrase est la suivante :“L’arbre qui cache la forêt”. La police d’écriture utilisée est similaire à celle du logotype, elle se prénomme DIN Regular. Pour les mêmes soucis de contraste et pour affirmer une cohésion graphique, le titre est représenté de la même couleur que le logo de la COP 28.
3 - 2- Analyse sémantique

Dans cette composition, la plupart des éléments représentés s'imbriquent logiquement dans l'environnement désertique. L'accoutrement de l’homme est adapté à cet environnement hostile, tandis que l’horizon laisse apparaître la ville de Dubaï, ville construite dans le désert. Bien évidemment, et comme nous l’avons déjà fait remarquer, c’est l’élément central, un arbre feuillus, qui attire particulièrement notre attention. Sa présence semble énigmatique et pose question. En effet, il est peu commun de trouver ce type de végétaux dans le désert. La mise en scène centrale de cet élément amène à nous demander le sens de ce signe.

Sémiotiquement, l'arbre est souvent considéré comme un symbole universel de la vie. Bien qu’ici, il prenne racine dans le sable du désert, à première vue, rien ne semble contre-indiquer ce symbolisme fort. Au contraire,ici, il pourrait même évoquer la supériorité de la vie face à la mort. La mort, qui serait représentée par les conditions habituellement mortelles du désert. Cet arbre pourrait être considéré comme un symbole d'espoir puisqu’il défie les conditions naturelles et parvient tout de même à se développer. Admirant ce courage métaphorique de l’arbre, l’homme de dos serait fasciné par celui-ci. Ce dernier serait en train de fixer l’arbre avec un émerveillement, ce qui irait de pair avec l’ambiance presque onirique de la scène.

Cependant, cette interprétation logique basée sur le rapport aux signes pourrait s'avérer trompeuse si l’on se réfère aux éléments linguistiques de l’affiche.

En effet, le titre de l’affiche « L’arbre qui cache la forêt » semble peu adapté à notre première interprétation de l’arbre symbole d'espoir. Le sens même de cette phrase pourrait paraître inadapté en vue de la composition. Dans un premier temps, évoquer la forêt dans un environnement désertique pose question. Bien sûr, il ne faut pas comprendre cette phrase dans son sens littéral, il s’agit d’une expression métaphorique. Elle est utilisée pour
signifier l’attention qui est souvent focalisée sur un élément particulier (l’arbre) au détriment de l’ensemble plus vaste ou situation générale (la forêt).

Dans ces conditions, nous pourrions nous demander ce qui représente la forêt dans cette scène. Si l’on se concentre sur l’arbre, les branches de ce dernier obstruent la ligne d’horizon et cachent littéralement la ville de Dubaï. Ici et au vu de l'expression « L’arbre qui cache la forêt », la forêt pourrait représenter Dubaï.

Pour mieux comprendre le rapport entre l’arbre et la ville de Dubaï, il nous faut analyser un dernier élément de l’affiche. En dessous du titre, le logo de la COP 28 EAU est représenté. Ce logotype permet de nous donner un contexte politique. À partir de celui-ci, une nouvelle interprétation du sens général de l’image pourrait prendre forme. Pour cela, il nous faut comprendre les objectifs et les acteurs de cet événement.

La COP 28 est une réunion mondiale visant à discuter et régler les problèmes d’urgences climatiques. Avant son ouverture, l’évènement fût au coeur de polémiques sur la base de conflits d'intérêt. Concrètement, le pays organisateur de l’événement, l'Émirat United Arabs, est aussi l’un des États qui à le moins d'intérêt à stopper la production des carburants à énergies fossiles. Avant son ouverture, le 30 novembre 2023, les principaux objectifs évoqués par l'État organisateur étaient la réduction des émissions de CO2 par compensation carbone (planter des arbres) et par l'augmentation de la production d'appareil à énergies renouvelables. Ces objectifs n'incluent pas l’arrêt de production des énergies fossiles.

Au terme de la COP 28, un consensus sous le nom de « transition vers la sortie d'énergie fossile » est acté. Cette terminologie, bien que consensuelles, n'évoque pas la fin du problème, mais un transition vers sa fin malgré l’urgence climatique.

À partir de ce contexte politique, l’expression « l'arbre qui cache la forêt » pourrait trouver un nouveau sens dans la composition de notre affiche. L'arbre, par sa position centrale, rappelle l’importance de la nature, mais cache derrière lui le véritable problème. Ce problème est représenté par une ville tirant sa richesse de l'extraction des énergies fossiles : Dubaï.
Seul au milieu du désert, l'arbre serait le symbole du manque d’action concret à l’issue de la
COP 28, et ce, malgré les réjouissances générales. Le choix de l'arbre pourrait aussi évoquer l’une des propositions de l’EAU : la compensation carbone. Cette proposition vise à planter des arbres, pour compenser les émissions de CO2. Cette alternative qui n’a jusqu’à maintenant jamais fait ses preuves, viserait à pouvoir justifier la destruction de l'environnement en se cachant derrière l’idée évocatrice d’un arbre.
4 - 3- Analyse pragmatique

La COP 28 est un événement très important qui avait pour objectif de dresser le premier bilan mondial de l’application de l’accord de Paris. Cette année, elle devait marquer la fin des énergies fossiles. Cependant, et selon les chercheurs du Global Carbon Project, les émissions nocives ont même augmenté de plus d’un milliard et demi de tonne de CO2 annuellement au niveau mondial depuis 2015. L’année de 2023 a été celle de tous les
records : de chaleurs, de concentration de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, de quoi faire prendre conscience de l’urgence à s’occuper de la crise climatique et de s’attaquer à la question essentielle, vitale : l’abandon des énergies fossiles.

Les défenseurs de l’environnement ont abordé cet événement avec un espoir mesuré. Le président de la COP 28, Sultan Ahmed al-Jaber, est aussi le PDG de la compagnie pétrolière émiratie Adnoc. Sans surprise, il s’est prononcé pour la fin des émissions des énergies fossiles et non pas pour la fin des énergies fossiles. La différence est le recours à la solution de captation des CO2 ou de compensation carbone, qui n’ont pas fait leurs
preuves. Il y a pourtant urgence, l’ONU a prévenu que l’espoir de rester sous 1.5 C° de réchauffement climatique s’éloignait et qu’avec la trajectoire actuelle, on risquait même de dépasser les 2°C maximum prévu par l’accord de Paris. Les médias du monde entier dénoncent cette situation et ont qualifié cet événement de “coquille vide”.

Les travaux de la COP 28 se sont terminés le 13 décembre 2023, et malgré le scepticisme général, certains affirment qu’un accord historique a été signé. Pour la première fois, le terme d’énergie fossile a été écrit noir sur blanc. Plus de 200 pays ont signé pour une transition vers un monde sans pétrole, sans charbon et sans gaz. Après d'intenses négociations, le texte de la COP 28 a enfin fait consensus sous les applaudissements des plus de 200 États, ça n'était jamais arrivé. Le texte appelle les Etats à une transition hors de ces énergies pour viser la neutralité carbone en 2050.

Il faut cependant nuancer cette avancée historique, cette COP devait être celle de la sortie des énergies fossiles, mais aujourd’hui, une nouvelle formulation a été trouvée, celle de la « transition vers la sortie d'énergie fossile ». Certains rappellent que le terme d'urgence climatique nécessite des actions urgentes. Cependant, la COP 28, c'est terminée sans réellement trouver d’objectifs à court terme, et ce, malgré une formule floue et consensuelle.

Au terme de la COP28, les 200 pays se sont engagés à tripler la capacité des énergies renouvelables notamment avec les éoliennes photovoltaïques d’ici à 2030, le nucléaire est ici évoqué pour la première fois comme une option pour réduire les émissions de CO2.
De plus, chaque État doit prendre des mesures précises à échéance courte (2025), pour limiter le réchauffement climatique à 1.5 C° contre 2,9 C° sans actions volontaristes.
5 -
6 - J'ai décidé de travailler sur ce sujet puisque j'ai pensé pertinent d'évoquer un événement actuel, et quoi de plus actuel que la COP 28 ? De plus, je me suis intéressé de près à cette réunion importante pour l'avenir. Il m'a semblé que les litiges entourant cet événement seraient un terrain particulièrement propice à la réalisation d'une image trompeuse.
7 - Grâce à l’analyse de notre affiche, et en l'absence de contexte politique, le symbole fort d'un arbre en bonne santé serait évocateur de la vie et de la nature. Dans les conditions difficiles du désert, la présence de cette vie serait symbole d’espoir et de détermination. 

Guidé par le titre de la composition "l'arbre qui cache la forêt", cette première interprétation vient pourtant être totalement remaniée par l’évènement et le contexte politique de la COP 28. Le sens premier de la composition se trouve totalement détournée. 
Le signe de l'arbre se trouve finalement utilisé pour cacher une vérité évocatrice de valeurs strictement opposées aux concepts de vies et d'espoirs. 

Avec ce nouveau contexte, l’arbre n’est plus le symbole de vie et d'espoir, mais est utilisé pour symboliser, cacher et justifier la destruction de l'environnement par les émissions CO2.
La composition va par conséquent trouver un tout autre sens. 

Par définition, cette affiche est une image trompeuse.
8 - J'ai pris beaucoup de plaisir à faire ce travail. Un sujet non imposé m'a permis de développer des idées et de créer librement du contenu qui m'intéresse.
Date Created
14/12/2023 20:49:14
Identifier
1082 3862 14/12/2023 20:49:1